Succédant
à une saison d'intense activité, la saison cyclonique
2002-2003 est restée, à bien des égards, dans la lignée
de sa devancière
Cela a été de nouveau, une saison longue et active
sur le bassin du Sud-Ouest de l'océan Indien
Le nombre de systèmes dépressionnaires à s'être développés
a même surpassé celui de la saison précédente, se situant
à un niveau très élevé
Mais si les perturbations ont été
plus nombreuses, elles ont, toutefois, été moins intenses
globalement que lors de la saison 2001-2002
(qui avait été exceptionnelle de ce point de vue), malgré
une proportion de nouveau supérieure à la normale de cyclones
tropicaux
Avec cette forte activité perturbée, peu de terres habitées
ont pu échapper à l'influence plus ou moins directe d'une
ou de plusieurs perturbations, qui ont prélevé un tribut
humain
et économique encore bien lourd cette saison...
Treize perturbations ont été classées au stade de tempête
tropicale (contre 11 la saison passée), soit un nombre
très important pour le bassin, puisque très proche
du nombre maximal de 14 observé
depuis le début de l'ère satellitaire (1967-1968)
Huit d'entre elles ont atteint la force ouragan (sept
cyclones tropicaux, plus un système subtropical ayant
atteint de manière éphémère ce stade)
Rappelons que la normale de l'activité du bassin se situe
à neuf tempêtes tropicales, dont un peu moins de la moitié
atteignent le stade cyclonique
A l'image de la saison précédente, cette forte activité
perturbée n'a pas résulté d'un nombre de cyclogenèses
hors norme
16 systèmes dépressionnaires ont fait l'objet de l'émission
de bulletins, soit seulement un de plus que lors de
l'exercice précédent et le même nombre que lors de la
peu active saison 1997-1998 par exemple
(ce nombre de cyclogenèses a d'ailleurs été très stable
au cours des dernières années, se situant depuis cinq
ans dans la fourchette 14-16, seule la saison 2000-2001
faisant exception)
Mais le taux de conversion en perturbations matures
(13 tempêtes tropicales pour 16 perturbations embryonnaires)
a été particulièrement élevé,
indiquant des conditions environnementales généralement
très favorables
Le nombre de perturbations baptisées ne suffit toutefois
pas à quantifier à lui seul le degré d'activité d'une
saison
Le nombre de jours d'activité cyclonique, paramètre
plus représentatif de l'activité perturbée, est en l'occurrence
nettement plus parlant et relativise le niveau d'activité
de cette saison
Avec 24 jours cumulés avec présence
d'un cyclone tropical sur zone (nombre de jours
cycloniques), cette saison ne présente
que 20% d'excédent par rapport à la normale (moyenne
de 20 jours)
et arrive loin derrière les 35 jours de 2001-2002
L'intensité moindre des perturbations de cette saison
et surtout leur longévité réduite au stade cyclonique
expliquent cette différence :
il n'y a ainsi eu qu'une seule perturbation
qui soit parvenue à se maintenir plus de trois jours à
la force ouragan -le cyclone KALUNDE-, contre
quatre la saison précédente
L'effet du nombre, 13 tempêtes tropicales ou cyclones,
a par contre joué sur le nombre de jours avec présence
d'un système dépressionnaire d'intensité au moins égale
à la tempête tropicale modérée
Avec 68 jours cumulés, on obtient un nombre nettement
supérieur à la normale (moyenne de 53, pour une médiane
de 48), correspondant à un niveau d'activité perturbée
élevé,
mais toutefois inférieur également à celui de la saison
précédente (où il avait atteint 73 jours), malgré un nombre
supérieur de perturbations
Si en terme de longévité, les perturbations de cette saison
n'ont pu rivaliser avec leurs devancières de 2001-2002,
il n'en a pas été de même pour la saison cyclonique
proprement dite,
qui a fait mieux que cela, s'étirant sur plus de huit
mois. 2002-2003 figure parmi les saisons cycloniques
à la fois les plus précoces et les plus tardives
Depuis le début de l'ère satellitaire (1967-1968), seulement
quatre saisons avaient démarré plus tôt et, curieusement,
quatre fini plus tard (en fixant le début de saison au
1er juillet)
Les zones de cyclogenèse ont constitué le point
de différentiation majeure comparativement à la saison
précédente
Contrairement à 2001-2002, aucun système dépressionnaire
n'a été issu du Sud-Est de l'océan Indien (à l'est du
méridien 90°E), tous se formant sur notre zone Sud-Ouest,
la zone centrale du bassin (au sud-ouest des CHAGOS) et
le Canal de MOZAMBIQUE, plutôt improductifs la saison
précédente, amenant cette fois une contribution prépondérante
Les systèmes se sont par ailleurs formés, en moyenne,
plus au sud, au voisinage ou au sud du 10ème parallèle
sud pour la majorité
La typologie des trajectoires a présenté quant
à elle des analogies certaines avec celle de la saison
antérieure
Qu'elles aient été pseudo-paraboliques classiques
(comme celles de KALUNDE ou CRYSTAL) ou atypiques
(comme celles de GERRY ou HAPE), les trajectoires méridiennes
ou
à orientation sud-est dominantes, ont été les plus
nombreuses, avec pour conséquence de privilégier l'évacuation
vers les latitudes sud d'une majorité de systèmes
Une trajectoire zonale s'est tout de même fait
remarquer, celle du premier système de la saison, formé
extrêmement près de l'Equateur et passé ensuite sur le
cœur de l'archipel des SEYCHELLES
Avec ce système, dès le début septembre et cette ouverture
précoce de la saison cyclonique, la tonalité à venir des
événements avait ainsi été affichée d'emblée :
cette saison ne passerait pas inaperçue et laisserait
des traces…
Cette première perturbation de la saison (non baptisée)
traçait, en effet, une route inédite de par sa proximité
de l'Equateur
Les SEYCHELLES, dont les îles principales se croyaient,
si ce n'est bénies des dieux, du moins à l'abri du risque
cyclonique, étaient traversées par un système dépressionnaire
jamais vu de mémoire d'homme
malgré l'intensité relativement faible de ce phénomène,
son passage était sérieusement ressenti sur la petite
île de PRASLIN, qui subissait des dégâts matériels significatifs
D'autres conséquences plus funestes étaient, hélas, à
venir…
Avec la forte activité perturbée, peu de terres habitées
allaient échapper à l'influence plus ou moins directe
d'une ou de plusieurs perturbations :
L'AFRIQUE AUSTRALE, et prioritairement sa façade maritime
mozambicaine, totalement épargnées l'an passé, subissaient
cette fois l'impact de la tempête tropicale DELFINA, puis
du cyclone tropical JAPHET
Plus que les vents, ce sont les pluies associées et les
inondations induites par ces deux météores qui ont fait
des dizaines de victimes au MOZAMBIQUE et au MALAWI
Les MASCAREIGNES ont pour leur part vu nombre de perturbations
rôder dans leurs parages, et si l'île MAURICE n'a été
qu'effleurée, et en conséquence modérément affectée,
par le cyclone GERRY, l'île RODRIGUES n'a pas été aussi
chanceuse, subissant de plein fouet le cyclone KALUNDE
Même si ce phénomène, le plus puissant de la saison, était
alors en phase d'affaiblissement, les rafales de vents
supérieures à 200 km/h et les pluies temporairement diluviennes
associées au passage du météore
ont provoqué d'importants dommages sur la petite possession
mauricienne
La fin de saison a de fait été difficile
MADAGASCAR, jusque là relativement épargné, puisque n'ayant
connu jusqu'au mois d'avril que l'influence très modérée
de la tempête tropicale FARI, a une nouvelle fois payé
un lourd tribut à l'occasion
de l'impact du dernier système dépressionnaire de la saison,
le cyclone tropical MANOU, qui a durement frappé la côte
est de la Grande Ile, faisant de nombreuses victimes
Avec MANOU la saison s'est clôturée comme elle avait commencé,
par un phénomène exceptionnel
Le cyclone tropical KESINY avait constitué un événement
inédit l'an passé, puisque c'était la première fois depuis
le début de l'ère satellitaire qu'un système dépressionnaire
affectait, au stade de cyclone tropical,
une terre habitée du bassin en mai
Mais MANOU a revêtu un caractère encore plus hors
norme. Plus intense que KESINY, il est surtout, des six
cyclones tropicaux répertoriées sur le bassin depuis 1967
au mois de mai,
celui ayant atteint cette intensité à la latitude la plus
élevée jamais observée durant cette période (au sud de
19°Sud)
Par ailleurs, le fait qu'un cyclone tropical ait pu toucher
une terre habitée deux années à suivre en mai, alors que
cela ne s'était jamais produit auparavant, oblige à se
poser des questions
S'agit-il d'une pure et extraordinaire coïncidence, ou
alors faut-il craindre que ce type de phénomène ne se
reproduise désormais régulièrement ?
On sait les multiples interrogations que suscite la perspective
du réchauffement climatique annoncé
Une des questions majeures pour notre zone, de même que
pour les autres bassins cycloniques du globe, est bien
sûr de savoir s'il faut envisager un accroissement de
l'activité cyclonique (en nombre et/ou intensité)
Les études actuelles n'ont pas permis de trancher cette
question, qui demeure ouverte
Mais on ne peut, toutefois, s'empêcher de penser que,
s'il n'y aura pas forcément d'impact durant le cœur de
la saison cyclonique, une modification des températures
de surface de la mer pourrait,
à la marge, avoir une influence, c'est-à-dire en début
ou en fin de saison cyclonique, en permettant des cyclogenèses
plus précoces et plus tardives
On peut alors raisonnablement s'interroger sur le fait
de savoir si les épisodes KESINY et MANOU ne sont pas
les premières manifestations tangibles d'un tel début
d'allongement de la saison cyclonique…
Le fait est que les températures de la mer étaient anormalement
élevées cette année 2003 et que la saison cyclonique a
effectivement été extrêmement longue,
s'étirant de septembre jusqu'à mai, soit sur plus de huit
mois
|